DES LIVRES QUE J’AI AIMÉS

 

DERNIÈRES NOUVELLES DES OISEAUX

D’Erik ORSENNA

 

aux Éditions Stock, 135 pages, 2005

 

 

Erik ORSENNA est Conseiller d’État et préside le Centre International de la Mer. Il est membre de l’Académie Française.

 

 

« Dernières nouvelles des oiseaux » est un livre conçu comme un livre pour enfants ; il contient de nombreuses illustrations en couleurs, d’aspects simplifiés, un peu comme dans un conte de fées et il fait la part belle aux exclus, aux incompris. Ces hurluberlus, ce sont eux, les oiseaux, une espèce gênante. Ils sont proches de la gente ailée puisqu’ils sont comme eux, assoiffés d’espace et de liberté.

En réalité, Erik ORSENNA nous parle d’enfants considérés anormaux car ils sont obnubilés par une idée et ont des manies étonnantes pour le commun des mortels ; par exemple, il y a celui qui ne construit que des escaliers, celui qui avait la manie des déménagements, celle qui était spécialiste de la mécanique et des roues, l’expert des colles et des clous, le spécialiste de la météorologie et des nuages… Un monde fou, inimaginable, incompris des gens sensés. (p. 25) Tous ces enfants avaient subi des déboires occasionnés par leurs tentatives téméraires d’inventions mais ils avaient persisté envers et contre tous dans leur voie.

Un président farfelu qui avait la manie des présidences, veut récompenser des enfants qui se passionnent pour une idée incongrue au premier abord et qui dépensent toute leur énergie pour la réaliser :

« - Quelque chose ne va pas, monsieur le président ?

- Au contraire, magnifique cérémonie. Quelle formidable jeunesse ! Avec elle, notre pays n’a pas à craindre l’avenir ! » (p. 17)

Le président réunit sept jeunes qui se passionnent pour une idée au risque de leur vie. Il les reçoit et ils peuvent exposer leur projet. Certaines phrases, tout au cours de ce livre, sont imprimées en gros caractères, pour insister sur leur importance comme :

« La passion est une armure. » (p. 24)

« T’as vu sur mon front ? Tu sais lire, au moins ? Il y a écrit « solitaire ». » (p. 27)

Le président désigne le vainqueur aux sept lauréats du prix de la passion :

« - Le vainqueur est… Personne. Ou vous tous. Tous les sept. Tous ensemble. » (p. 26)

Chacun est très surpris mais applaudit, encore plus surpris du prix obtenu, un séjour en colonie de vacances dans une île. Au départ, tous refusent, tous voulant rester « solitaire » et grâce à l’esprit de diplomatie du président, tous finissent par accepter et vont aller d’étonnement en étonnement car aucun programme n’est prévu (p. 29) ; ils sont livrés à eux-mêmes et doivent décider de ce qu’ils vont faire. Chacun s’enferme alors dans son projet qui ne peut alors aboutir. Comment les intéresser aux autres ? Tout va mal jusqu’au jour où une tempête les met dans une situation de détresse et de danger.

Alors chacun essaie de faire fructifier ses dons pour tous sans s’en rendre compte. Construire un avion pour voler, nécessite de travailler tous ensemble. Ils se passionnent alors pour leur projet si bien que lorsque les secours arrivent pour les évacuer, ils refusent de partir. Peu à peu, ils pensent aux autres, eux qui étaient auparavant des solitaires, centrés sur eux-mêmes, et le miracle se produit… celui de la communication, de l’échange :

« C’était ça, l’avion, notre avion ? » (p. 120)

L’avion va pouvoir décoller grâce au vent :

« La première des pistes, c’est le vent. » (p. 123)

Mais la liberté n’est pas toujours contrôlable ; parents et président sont dépassés par la situation quand les jeunes décident d’eux-mêmes, de ne jamais s’arrêter de voler. Les adultes bien établis veulent leur faire entendre raison mais… :

« personne, pas même un président ne peut emprisonner quelqu’un dans un seul rêve. » (p. 133)

Les enfants s’envolent alors vers la liberté absolue, dans la soif d’un projet jamais terminé.

 

Catherine RÉAULT-CROSNIER

Février 2006

 

 

Mis en ligne avec l'aimable autorisation téléphonique de Monsieur Erik Orsenna, du 7 avril 2006.