5èmes RENCONTRES LITTÉRAIRES
DANS LE JARDIN DES PRÉBENDES

Vendredi 1er août 2003, de 17 h 30 à 19 h

 

Léopold Sédar SENGHOR

par Hélène BOURLIEUX

Hélène BOURLIEUX et José KANDOT, lisant le texte d'Hélène BOURLIEUX sur Léopold Sédar SENGHOR, lors des 5èmes Rencontres littéraires au jardin des Prébendes, à Tours, le 1er août 2003.

 

J’ai choisi un africain, tourangeau de 1935 à 1938, pour cette rencontre : Léopold Sédar SENGHOR. La partie « poèmes » sera lue par notre griot tourangeau, José KANDOT.

Léopold Sédar SENGHOR est mort le 20 décembre 2001, à son domicile en Normandie, à l’âge de quatre-vingt-quinze ans.

Il était poète et homme politique. Toute sa vie, il vécut pour l’idée de métissage culturel et pour une civilisation de l’universel… Cet euro-nègre était le symbole de l’antiracisme. Il fut avec Aimé CÉSAIRE, chantre de la négritude. Professeur de français-latin-grec au lycée Descartes de Tours de 1935 à 1938, ce premier agrégé africain est fondateur d’une branche maîtresse de la littérature française moderne. Écrivain, il anime en 1956, le premier congrès international des écrivains et artistes noirs. C’était un intellectuel, formé à Paris, qui pensait et écrivait en français. Il acquit la nationalité française en 1933 pour pouvoir présenter son agrégation de grammaire. Il est élu à l’Académie française en 1984. Léopold Sédar SENGHOR était collègue et ami de Georges POMPIDOU.

 

JARDIN DE FRANCE

Calme jardin,
Grave jardin,
Jardin aux yeux baissés au soir
Pour la nuit,
Peines et rumeurs,
Toutes les angoisses bruissantes de la Ville
Arrivent jusqu’à moi, (…)

 

LE PORTRAIT

Voici que le printemps d’Europe
Me fait des avances
M’offre l’odeur vierge des terres,
Le sourire des façades au soleil
Et la douceur grise des toits
En douce Touraine.

 

Léopold Sédar SENGHOR, homme politique :

1945 est la date de son entrée en politique et aussi celle de l’apparition de son premier recueil de poèmes « Chants d’ombre ». Il fut député français du Sénégal dès 1945 avant de devenir Secrétaire d’état à la présidence du Conseil sous Edgar FAURE en 1955 puis ministre conseiller de DE GAULLE. Il devint le premier chef d’un état africain, le Sénégal.

 

FEMME NOIRE

(…)

Femme nue, femme obscure
Fruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma bouche
Savane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d’Est
Tamtam sculpté, tamtam tendu qui grondes sous les doigts du vainqueur
Ta voix grave de contralto est le chant spirituel de l’Aimée.

(…)

 

Léopold Sédar SENGHOR, homme privé :

SENGHOR est un nom sans doute d’origine portugaise signifiant « Seigneur ». SENGHOR – Sénégal venant de la même racine.

Chrétien noir, il eut deux mariages et trois enfants dont deux sont morts avant lui : l’un en se suicidant, l’autre d’un accident de voiture.

Léopold Sédar SENGHOR est né à Djilor, le 9 octobre 1906. Son père, commerçant, baptisé et polygame, habitait à Joal, à quelques quatre kilomètres de Djilor. Léopold Sédar est né de sa quatrième épouse. Il grandit parmi deux douzaines de frères et sœurs avec bergers et paysans.

 

JOAL

(…)

Je me rappelle les signares à l’ombre verte des vérandas
Les signares aux yeux surréels comme un clair de lune sur la grève.

Je me rappelle les fastes du Couchant
Où Koumba N’Dofène voulait faire tailler son manteau royal.

 

À l’âge de sept ou huit ans, il est envoyé à l’école des blancs ; il apprend le français en faisant chanter des mots magiques et pittoresques comme : « CONFITURE ».

À seize ans, il veut devenir prêtre et entre dans un séminaire d’où il est renvoyé pour manque d’obéissance.

À vingt-deux ans, il découvre la France mais ne devient citoyen français qu’en 1933, soit à l’âge de vingt-sept ans.

En 1939, c’est la guerre, Léopold Sédar SENGHOR est mobilisé. Prisonnier en juin 1940, il passe vingt mois de captivité avec des hommes du peuple africain, à qui il dédira son premier recueil de poèmes « Hosties noires » publié en 1948.

 

FEMMES DE FRANCE

Femmes de France et vous filles de France
Laissez-moi vous chanter ! Que pour vous soient les notes claires du sorong.

Acceptez-les bien que le rythme en soit barbare, les accords dissonants.

(…)

 

Léopold Sédar SENGHOR, poète :

« Mes poèmes voilà l’essentiel », disait-il !

L’inspiration, la structure même de sa poésie est africaine. En utilisant la langue française, il est resté africain dans son inspiration comme dans son rythme ; il évoque souvent l’accompagnement d’instruments et fait référence aux griots. Pour lui, la poésie est aussi danse et musique. Je m’exprime en français parce que je pense en français, parce que c’est la langue qui dompte le mieux les sauvages richesses de mes racines.

 

Le poète en Touraine :

La période où SENGHOR arrive à Tours marque à ses yeux, un tournant dans la poésie.

« C’est à mon arrivée à Tours que j’ai brûlé tous mes poèmes écrits jusque là et suis reparti à zéro. Dans les premiers poèmes, j’avais trop subi l’influence de la poésie française. Je me suis donc mis à l’école de celles que j’appelle « MES TROIS GRÂCES », poétesses de mon bourg natal. »

Pendant son séjour en Touraine, Léopold Sédar SENGHOR fait connaître l’Afrique aux tourangeaux et s’est intéressé à la politique. Il élut domicile 74 rue Bernard Palissy puis 89 bis boulevard Heurteloup. Pendant son séjour à Tours, il prépare sa thèse sur les formules verbales dans les langues du groupe sénégalo-guinéen. À Tours, il fréquente la famille Louis GUITTON où au cours de réunions, il lit des ébauches de ses poèmes qui seront publiés après la guerre.

Léopold Sédar SENGHOR, on le rappelle, a enseigné au lycée Descartes de Tours entre les années 35 et 38 ; il était professeur de français-latin-grec.

 

PRINTEMPS DE TOURAINE

(…)

Printemps de Touraine
Je suis un sauvage, un
Violent.

Printemps de Touraine
Laisse-moi dormir.
On ne badine pas avec le Nègre.

 

JARDIN DES PRÉBENDES

Jardin des Prébendes
Tu m’as touché l’épaule
Comme je passais le long de tes grilles vertes,
Indifférent…

C’est aujourd’hui que tu m’es ami,

(…)

 

À Tours, on dit se rappeler l’avoir vu amoureux d’une tourangelle !

 

 

Les références ont été prises sur les documents suivants :

- Léopold Sédar SENGHOR, œuvres poétiques, éditions du Seuil

- Léopold Sédar SENGHOR par Joseph de BENOIST avec témoignage de cheik Hamidon KANE, aux éditions Beauchesne

- Léopold Sédar SENGHOR, poètes d’aujourd’hui chez Seghers

Sans oublier le dossier prêté par la Bibliothèque de Tours.

 

MERCI